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Ils y étaient, ils racontent

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Ils se sont soulevés en mai 68 contre une société qu'ils jugeaient archaïque. Près d'un demi-siècle plus tard, c'est la crise économique qui alimente les révoltes. Des anciens "68ards" reviennent sur ces évènements qui ont marqué l'histoire de France et livrent leur regard sur la contestation actuelle. Quels sont les vestiges de leur lutte ? 

Pourquoi Mai 68 ? 

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"Les étudiants extrêmistes n'ont pas apprécié l'intervention de la police."

Jean-Pierre Abitbol, né en 1942 à Tunis, est arrivé à Paris en 1962 suite à la crise de Bizerte. Étudiant à l'université, il habite rue du Cardinal Lemoine, en plein cœur du Quartier Latin, là où se dérouleront quelques années plus tard les révoltes étudiantes de Mai 68 auxquelles il a participé.

"Mai 68, c'est parti de bien peu de choses".

Jean-Luc Leray a 18 ans au moment des évènement de Mai 68. Bien qu'encore lycéen, il participe aux manifestations.

 

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C'était comment dans les manifestations ? 

"C'était un moyen d'exister. J'ai balancé des projectiles, ce n'était pas très glorieux."

"J'ai toujours évité d'être tête de cortège avec des pavés et des cocktails molotov"

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Quel bilan tirer des révoltes ? 

"Mai 68 ça n'a jamais été une révolution. C'était une révolte." 

"Mai 68 a apporté la société actuelle et la reconnaissance de nombreux droits"

Peut-il y avoir un Mai 2014 ? 

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"A l'époque, en 68, il existait une société. Même si elle était hiérarchisée, il y avait quand même un vivre ensemble. Aujourd'hui moins."

"Les gens peuvent s'enflammer sur n'importe quel sujet à n'importe quel moment"

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Les V.I.P. de Mai 68

Daniel Cohn-Bendit

Surnommé “Dany le rouge” par les médias, c’est la figure emblématique de mai 68. Inscrit en Sociologie, il crée le “mouvement du 22 mars” : ces 150 étudiants qui occupent la fac de Nanterre. A l’origine de leur colère, la guerre du Vietnam mais aussi une société qu’ils jugent trop conservatrice. Le campus rapidement fermé, le mouvement se propage jusqu’à la Sorbonne.  Le 3 mai, la police occupe et évacue la fac. C’est le début des révoltes. Daniel Cohn Bendit devient porte-parole et leader des contestations. En conséquence, il est expulsé le 22 mai 1968 vers l’Allemagne, pays dont il a la nationnalité. Il revient quelques jours plus tard en France, mais cette interdiction de séjour ne sera levée qu’en 1978. Homme politique et député européen pendant 20 ans, il est membre des Verts depuis 1984.

Jean-Paul Sartre

L’écrivain-philosophe n’est pas un des instigateurs des événements de mai 68 mais il participe grandement à relayer le mouvement dans la presse. Il fait écho dans les médias des révoltes de la rue et des amphithéâtres. Il interview notamment Daniel Cohn-Bendit dans le Nouvel Observateur et créé le célèbre slogan “élections, pièges à cons”. À 63 ans, on le voit se rendre aux portes des usines en grève, et à la Sorbonne discuter avec les étudiants révoltés. Sur le plan international, en août 1968, il dénonce le Printemps de Prague en Tchécoslovaquie et condamne l’intervention soviétique. Atteint d’urémie, il meurt à Paris en 1980, et est inhumé au cimetière de Montparnasse aux côtés de Simone de Beauvoir.

Jean-Luc Godard

Le cinéaste franco-suisse et l’un des fondateurs de la Nouvelle Vague ne restera pas neutre devant le conflit de Mai 68. La censure d’Une Femme mariée (1964) marque un engagement politique à gauche. Il prend position contre le ministre de la Culture André Malraux, et leur relation sera loin de s’arranger avec l’Affaire Langlois. En soutien à son ancien mentor et génie de la cinémathèque, Il participe à la manifestation du 12 février 68. Dans le même temps, Il découvre le terreau maoïste des étudiants grâce à sa nouvelle compagne Anna Wiazemsky. Il en tirera le film La Chinoise (1967), qui préfigure une révolution de la jeunesse tout en les montrant comme des jeunes bourgeois.En 1968, il demande l'arrêt du Festival de Cannes par solidarité avec les étudiants. En juillet cette même année, il tourne Un film ordinaire où dialoguent étudiants et ouvriers de l’usine Renault de Flins sur les enseignements de Mai 68.

Jacques Sauvageot

Licencié en Droit et Histoire de l’art, vice-président de l’UNEF, membre du Parti Socialiste Unifié (PSU);  en 1968, Jacques Sauvageot est un militant syndicaliste proactif. Il fait figure, aux côtés de Daniel Cohn Bendit et d’Alain Geismar, de leader des contestations. Le 3 mai, il fait partie de la délégation chargée de négocier le départ des CRS,  il est arrêté lors de ce que l’on considère comme la première nuit de révolte dans le Quartier Latin. Le 13, il est en tête du cortège de la manifestation qui rassemble plusieurs milliers de parisiens. En 1969, Jacques Sauvageot devient Président d’honneur de l’UNEF avant de démissionner deux ans plus tard. Après son service militaire il entre à l’école nationale des beaux-arts de Nantes comme professeur d’histoire de l’art. De 1993 à 2009, Jacques Sauvageot est président des Beaux-Arts de Rennes.

Alain Geismar

Cet ancien élève de l’École Nationale Supérieure des mines de Nancy commence à militer aux Etudiants Socialistes Unifiés pendant ses études de physique. Après un bref passage au PSU, il intègre en 1965 le Syndicat national d’enseignement supérieur. En 1968, il a 28 ans et occupe la fonction de secrétaire général du SNE Sup. Devenu maître assistant au laboratoire de physique de la rue d’Ulm, le 3 mai, il lance un appel à la grève dans l’enseignement supérieur. Après mai 68, il dirige une organisation maoïste - la Gauche Prolétarienne - qui lui vaut une incarcération de dix-huit mois pour reconstitution de mouvement dissous. Il est aujourd’hui maître de conférence à l’IEP de Paris.

Romain Goupil

Au moment de mai 68, Romain Goupil (pseudonyme qu’il préfèrera au très classique Romain-Pierre Charpentier) est un lycéen qui approche de ses 17 ans. Très actif sur le plan politique, il est militant à la JCR (Jeunesse Communiste Révolutionnaire). Romain Goupil fait partie des fondateurs du Comité Lycéen CAL, qui regroupe des dissidents des Jeunesses Communistes et tous ceux qui souhaitent lutter contre les “lycées casernes” et pour la liberté d’expression. Avec ce groupe, Romain et ses camarades participeront aux manifestations de Mai 68, puis ils seront dissous en 1969. Romain Goupil se tourne alors vers le cinéma mais n’oublie pas les évènements de mai. Il réalise son premier long métrage Mourir à 30 ans, consacré à son camarade Michel Recanati et réalisé à partir d’épreuves de tournage avant et après mai 68.

Alain Krivine

En 1968, Alain Krivine a 27 ans et officie comme secrétaire de rédaction chez Hachette. Après avoir fait parti des Jeunesses communistes il rejoint l’Union des étudiants communistes (UEC) dont il prend la direction en 1958. En 1966, il fonde  la Jeunesse Communiste Révolutionnaire (JCR). Le 3 mai, il descend dans la rue avec les étudiants et sera interpellé par les CRS à la Sorbonne. La JCR est dissoute au mois de juin et Alain Krivine emprisonné en juillet. A sa libération quelques semaines plus tard, il crée la Ligue Communiste et sera par deux fois candidat aux présidentielles de 1969 et 1974. Jusqu’en 2009, il était l’un des porte paroles de la Ligue Communiste Révolutionnaire aux côtés d’Olivier Besancenot.

Henri Langlois

Jeune homme passionné de cinéma, il fonde en 1936 la Cinémathèque Française avec son ami Georges Franju et Jean Mitry, avec le désir de sauver des films de l’oubli. En 1968, le ministre de la Culture André Malraux souhaite lui retirer la direction administrative de la cinémathèque tout en le laissant directeur artistique. Les négligences administratives et la mauvaise gestion des importants moyens financiers dont disposait Langlois ont fini par convaincre le ministre d’agir. D’abord soutenu par Daniel Cohn-Bendit encore inconnu à ce moment là, puis à l’Assemblée nationale, Mitterrand fait entendre sa voix en faveur de Langlois. La protestation prend alors une toute autre ampleur : le fleuron du cinéma français et étranger bataille et manifeste pour qu’Henri Langlois retrouve son poste. André Malraux capitule le 22 avril 1968.

Jakie Le Katangais

De son vrai nom Jean Claude Lemire, il est le leader des Katangais, ce groupe de révolutionnaires, parfois sans emploi, mais ayant abandonné leur profession et qui prétendaient pour certains être des anciens mercenaires du Katanga (Congo). Ils apportèrent leur soutien aux étudiants de Mai 68 avec quelques armes et une sérieuse envie d’en découdre avec les forces de l’ordre. Puis les étudiants les expulsèrent de la Sorbonne. Le 26 juin 1968, Jimmy le Katangais est assassiné par un autre membre du groupe. De cette affaire s’ensuit l’arrestation progressive des katangais dispersés dans toute la France. Trois d’entre eux sont condamnés à 6,5 et 3 mois de prison.
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